L'idée est simple, faire un book, une expo avec juste pour sujet une photo du soleil levant prise tous les matins en mer. Le travail progresse. Ce matin là, il faisait rose, sensation indescriptible, une brumasse humide à travers de laquelle l'astre de feu avait bien du mal à percer. Il ne filtrait que des rayons rosés, sur une mer calme et un ciel couvert. Impression de flottement, j'étais là en apesanteur, entre ciel et l'eau... Depuis que nous avons délaissé définitivement les coquilles, nous nous sommes tournés vers le poisson. La sole, voilà ce que nous cherchons. Et cette année, il n'y en a pas. Je vous attends déjà dire "Ah ces pecheurs, jamais contents, ils en veulent toujours plus". Mais si, je vous l'assure depuis maintenant 18 ans que tous les printemps je traque, assidument ,mes princesses aux yeux verts, je n'en ai jamais vu si peu. 3 à 4 fois moins que d'habitude. C'est bizarre, inquiétant et démoralisant. Surpeche, printemps tardif, chacun y va de ses explications, on se rassure comme on peut. Ce jour là, un beau St Pierre de 2.5 kg se prit dans les trémails. Pièce rarissime, surtout de cette taille dans nos contrées, zeus faber finit donc dans la gamelle du patron. Après l'avoir laissé 2 jours au frigo, qu'il rassise un peu, j'ai du lui couper la queue pour le mettre dans un plat en pyrex pour passer au four. Un lit d'echalotes et de persil, quelques baies roses et poivre de Sichouan, quelques noisettes de beurre, fleur de sel et poivre du moulin, le foie réservé pour la fin de cuissson, le voici donc dans son plus simple apparat pret à passer une bonne 1/2 H au four à 200°C. Après 10 mn de cuisson, il sera mouillé avec un délicieux breuvage, un Savennères d'Eric Morgat Domaine de la Monnaie, l'Enclos 2003. Avec les tagliatelles qui l'accompagnent, on fera réduire à cru une grosse poignée d'oseille de printemps dans une russe, poivre et sel, puis 2 belles cuillères à soupe de creme fraiche. Le St Pierre cuit au naturel sur l'arête, tagliatelles à la jeune pousse d'oseille, foie sur toast, voilà une façon élégante d'oublier l'absence des soles.